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Joseph DELOEUF

L’école de la Salpêtrière et l’école de Nancy

Le magnétisme animal (1890) - Section I

Date de mise en ligne : samedi 10 septembre 2005

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L’école de la Salpêtrière et l’école de Nancy
I

Je venais d’entrer à l’université, - c’était en 1850, - lorsqu’il me tomba sous la main un petit livre traitant du magnétisme. Intéressé, mais défiant, je lus les deux seuls ouvrages que possédait alors la bibliothèque de Liège sur la question, le Traité du somnambulisme d’Alexandre Bertrand (1823), et l’Histoire académique du magnétisme animal (1841), du docteur Dubois, d’Amiens. À moitié converti par le premier ouvrage, je fus bien près de l’être tout à fait par le second, tant son auteur mettait de passion et de mauvaise foi à dénaturer les faits et à dénigrer les magnétiseurs. Son livre n’est qu’un long développement de ce dilemme, dupes ou fripons.

Depuis lors, je me tins assez au courant de la littérature concernant la science nouvelle. C’est ce qui m’avait enhardi, dès le 22 décembre 1869, à expliquer par l’auto-suggestion les phénomènes présentés par Louise Lateau.

J’eus de plus l’occasion d’observer, dans ma famille, un cas très remarquable d’hystérie. Enfin, j’avais assisté à l’une ou l’autre expérience publique. Toutefois, je ne me hasardai pas à faire de la pratique. Je pensais alors, avec le vulgaire que le magnétisme n’était pas absolument inoffensif. Ainsi même en 1885 ! je refusai une offre qu’un an plus tard j’aurais acceptée avec empressement. Je répétais avec quelques élèves les expériences de M. Ch. Richet sur la communication de la pensée - par parenthèse, les miennes furent absolument négatives - lorsque l’un d’eux se sentit, disait-il, fortement sous mon influence et prêt à tomber en somnambulisme pour peu que je le voulusse. J’évitai avec soin de le vouloir.

Cependant, les travaux sur le magnétisme se multipliaient. La Revue philosophique insérait de nombreux articles de M. Charcot et de ses élèves. Je les lisais avec avidité, étonnement et... confiance. Mais le doute entra dans mon esprit le jour où MM. Féré et Binet publièrent leur fameuse découverte du transfert par l’aimant. Un beau matin, je n’y tins plus : je voulus voir.

Le transfert par l’aimant n’était cependant que l’extension d’une invention récente, la métallothérapie. On sait en quoi consiste ce mode de guérison. Il y a des malades, des hystériques principalement, qui sont soulagés par l’application sur la partie douloureuse ou paralysée d’une plaque d’un certain métal : cuivre, étain ou zinc, or, argent ou platine, selon les individus - affinités électives d’étrange sorte, bien propres à mettre à l’épreuve la crédulité des hommes de science. Mais l’aimant fait plus ; non seulement il déplace les maux - la paralysie par exemple - en les transportant d’un bras ou d’une jambe à l’autre, mais il va jusqu’à changer chez les sujets l’amour en haine, la colère en pitié, la gaieté en tristesse. Mieux encore, l’année dernière, le Dr Babinski, médecin à la Salpêtrière, assura que, toujours au moyen de l’aimant, les malades pouvaient troquer leurs affections morbides ; et, à l’hospice même, on fit assister des savants à ces étonnants échanges ! Au fond, c’était plus merveilleux encore que la médicamentation à distance : il suffisait d’effectuer ces transports entre l’homme et un animal pour qu’un nouveau genre de thérapeutique fût créé.

Me voilà donc en route pour Paris, réfléchissant pendant tout le trajet aux expériences à faire et aux précautions à prendre pour ne pas m’égarer. Le jour même de mon arrivée, je voyais M. Ribot, qui me présentait à M. Binet, qui, le surlendemain, me présentait à M. Charcot. La Salpêtrière me fut ouverte.

Là, je fus témoin des fameux trois états, léthargie, catalepsie, somnambulisme [1] ; là, je vis les états dimidiés et les stupéfiants états composés ; là, on me montra en action l’hyperesthésie neuro-musculaire ; là, enfin, on me fit assister aux expériences sur le transfert. Mais quand je vis comment on faisait ces dernières expériences ; quand je vis qu’on négligeait des précautions élémentaires, par exemple de ne pas parler devant les sujets, qu’on annonçait tout haut ce qui allait se produire, qu’au lieu d’opérer avec un électro-aimant actionné à l’insu du sujet et de l’expérimentateur, celui-ci se contentait de tirer de sa poche un lourd fer à cheval ; quand je vis qu’il n’y avait pas même de machine électrique dans le laboratoire, je fus assailli de défiances qui, insensiblement, minèrent ma foi dans tout le reste.

C’est aussi à la Salpêtrière que j’eus recours à un curieux procédé pour raviver les souvenirs chez les somnambules.

Malgré toutes les recommandations et toute l’insistance de M. Féré, la fameuse Wittman n’avait pu se rappeler un rêve qu’on venait de lui donner. J’interviens ; on lui suggère un autre rêve ; elle se souvient !

C’était là un résultat important. À la Salpêtrière, l’amnésie des sujets n’était donc pas irrévocable. La Wittman ne se souvenait pas avec M. Féré ; elle se souvenait avec moi. N’était-ce pas un commencement de preuve que la tradition, l’éducation, l’habitude, jouaient un rôle capital dans la conduite des sujets ? Toutefois, c’est plus tard seulement que je tirai cette conclusion.

II

Je revins de la Salpêtrière reconnaissant, émerveillé, mais un peu bouleversé. Je n’eus plus qu’un seul désir, avoir un sujet pour expérimenter par moi-même en notant avec soin toutes les circonstances qui entoureraient la naissance des phénomènes hypnotiques.

Pour cela, il me fallait une hystérique. N’était-ce pas à Paris un dogme, que les hystériques seules étaient susceptibles d’être plongées dans le somnambulisme ?

Mon collègue, M. le professeur Masius, me procura une jeune malade, d’apparence saine et robuste, mais affligée d’une aphonie de nature hystérique, seul symptôme de l’espèce qu’elle présentât. On sait que l’hystérie, dont le vulgaire se fait une idée effrayante et très fausse, est une certaine disposition de l’organisme à simuler toute espèce de maladie en l’absence de cause matérielle appréciable. C’est ainsi que des hystériques seront paralysées de tout un côté du corps, sans qu’elles aient aucune lésion des membres ou des centres nerveux. C’est cette absence de lésion qui permet, sous l’influence de diverses pratiques - la métallothérapie par exemple - de faire facilement passer la paralysie de l’autre côté.

Dès la première séance, la jeune fille tomba en léthargie, ou plus exactement, dans ce qu’on nous avait dit être la léthargie. Mais elle ne présenta pas le phénomène de la catalepsie. Quand nous lui ouvrions les yeux, elle s’éveillait. Ce n’était pourtant pas faute de l’engager indirectement à conformer ses actes à la théorie dont nous étions imbus. Quoique déconcertés, nous nous mettons à lui frotter énergiquement le vertex en lui enjoignant d’ouvrir les yeux. Elle les ouvre enfin et la voilà en somnambulisme. Joie, étonnement, admiration. C’est avec un recueillement presque religieux que nous lui donnons des hallucinations, que nous écoutons ses paroles, que nous notons ses moindres gestes.

J’ai raconté ailleurs par quel concours fatal de circonstances [2], dès le second jour, je dus abandonner ce sujet. Ajoutez les installations déplorables de l’hôpital de Bavière, les préjugés qui y régnaient alors parmi les sœurs et les infirmiers, les difficultés résultant de la collaboration d’un praticien qui veut courir au but à savoir la guérison, par le chemin qu’il croit être le plus court, et d’un psychologue attentif surtout à la marche suivie et aux accidents de la route.

Toujours est-il qu’avec notre malade nous ne pûmes obtenir la catalepsie. Un état en moins.

Une autre jeune fille, pensionnaire payante de l’hôpital, s’offrit comme sujet d’expériences. Elle était franchement hystérique, et les maux pour lesquels on la soignait relevaient uniquement de l’hystérie. Grande liseuse de romans, peu de sommeil. Tous mes efforts pour l’endormir furent infructueux.

J’étais découragé. Je me rappelai alors que, dans son ouvrage qui venait de paraître sur Le somnambulisme provoqué, M. Beaunis, professeur à la faculté de médecine de Nancy, niait que les hystériques fussent des sujets favorables. Selon lui, les gens sains, robustes et simples, les paysans, les ouvriers, les soldats, étaient bien autrement sensibles au magnétisme.

Cette assertion n’était pas d’accord avec ce que j’avais vu, et, le dirai-je ? je n’en croyais rien. Toutefois, j’essayai. J’avais justement à ma disposition deux jeunes filles de la campagne, deux sœurs, parfaitement constituées et de mœurs irréprochables. Dès le premier jour, j’obtins avec la plus jeune de l’engourdissement, et au bout de deux semaines d’exercices, une demi-heure environ chaque soir, je la fis tomber dans le sommeil. De léthargie encore ; mais ni catalepsie, ni somnambulisme. Si j’ouvrais ses yeux ou frictionnais son vertex, elle s’éveillait. Un soir, sa sœur aînée, entrant dans mon bureau, la vit qui dormait. Je lui demandai si elle ne voudrait pas se prêter à être endormie. Elle ne fit aucune difficulté. Le sommeil de sa cadette offrait d’ailleurs l’image du repos le plus paisible. Au bout de sept minutes, elle était endormie et entrait d’emblée en somnambulisme, sans friction sur le vertex. Elle se leva, marcha, causa, et, réveillée, n’accusa ni malaise ni souvenir.

J’avais une somnambule !

Mais où donc étaient les phénomènes de la Salpêtrière ? Des trois états, si essentiels et si caractéristiques, je ne produisais que le premier ou le troisième, et encore dans des conditions anormales.

Comme j’avais alors en vue des expériences sur la mémoire des somnambules et que je ne voulais pas risquer de gâter mon sujet par des essais maladroits, j’en cherchai d’autres qui avaient déjà servi. Un M. Ch... voulut bien me mettre en rapport avec deux ou trois jeunes gens qui avaient été fascinés par Donato. Allures complètement différentes. Yeux démesurément ouverts, visage convulsé, corps contracturé, mouvements violents et brusques, voix rauque et indistincte. Je soupçonne alors que la conduite des sujets pourrait provenir en partie de leur hypnotiseur. Je fais des expériences pour vérifier mes soupçons et elles en montrent la légitimité.

Je tenais enfin l’explication des phénomènes exhibés à la Salpêtrière : ils étaient dus à l’entraînement et à la suggestion. L’opérateur aura regardé comme essentiels des caractères tout individuels, sinon purement accidentels, présentés par son premier sujet. Usant inconsciemment de la suggestion, il les aura transformés en signes habituels ; il se sera attaché, toujours sans le savoir, à les obtenir des autres sujets qui les auront reproduits par imitation, et ainsi le maître et les élèves, s’influençant réciproquement, n’auront pas cessé d’alimenter leur erreur. Ce fut la matière d’un article que je publiai dans la Revue philosophique, en août 1886, et intitulé : De l’influence de l’imitation et de l’éducation dans le somnambulisme provoqué. Je me ralliais ainsi aux affirmations de l’école de Nancy.

À ces déductions si fortement appuyées par les faits, qu’a répondu l’école de la Salpêtrière ? Que mes sujets et ceux de Nancy n’étaient que des « somnambules vulgaires », que Paris seul était en possession du « grand hypnotisme ». Tandis que nous, nous n’avions que le petit hypnotisme, un hypnotisme de province ! (Revue philos., nov. 1886.)

Il serait difficile de trouver dans l’histoire des sciences un autre exemple d’une aberration se perpétuant ainsi par pur amour-propre. Ce conflit entre les deux écoles est aujourd’hui jugé ; mais il se maintient encore, grâce au prestige de M. Charcot.

M. Charcot est peut-être le savant de l’Europe qui a le mieux étudié les maladies nerveuses, et qui a le plus fait pour intéresser les savants au magnétisme. Remarquant une analogie entre certains phénomènes hystériques et certains phénomènes hypnotiques, il assimile l’hypnose à l’hystérie. Imbu de cette idée, il obtient de deux ou trois hystériques plongées dans l’hypnose les phénomènes auxquels il s’attendait, sans se douter qui s’en serait douté au début ? - qu’il les provoquait lui-même ; et voilà son opinion assise sur l’expérience. Ses élèves sont convaincus, puisqu’ils ont vu. Et alors, par conviction d’abord, par entraînement ensuite, enfin par respect n’osant contredire le maître, et par point d’honneur ne voulant pas contredire leurs précédentes affirmations, illusionnés et se dupant eux-mêmes, ils passent à côté des faits les plus parlants sans les entendre, ils ferment les yeux devant les manifestations les plus éclatantes, et s’empêtrent dans une théorie physique de phénomènes d’origine purement psychologique ! Ils frictionnent le vertex pour faire tomber le sujet en somnambulisme ; ils lui ouvrent les yeux pour le mettre en catalepsie ; en lui ouvrant un œil, ils ne lui impriment que la catalepsie d’un côté du corps ; ils lui abaissent les yeux, le sujet pleure ; ils lui relèvent les coins de la bouche, le sujet rit ; ils lui contractent les sourcils, le sujet devient colère ; ils lui joignent les mains, le sujet prie.

Certes, quand on voit ces choses, elles paraissent démonstratives et lumineuses. Je suis revenu de Paris absolument convaincu. Il est heureux pour moi que, contre mon attente, mon premier sujet n’ait pas obéi à mes manœuvres, corroborées pourtant - j’en suis sûr - d’injonctions verbales, sans quoi je verserais peut-être encore dans le salpêtriérisme. Ma personnalité scientifique est peu de chose. Mais le fait que, imitant en tout point les procédés de Paris, je suis tombé presque malgré moi sur les résultats de Nancy, a une haute signification. Actuellement encore, le « grand hypnotisme » reste le privilège de la grande capitale, et des cinq ou six hystériques (sont-elles bien six ?) de la Salpêtrière. Ni MM. Liébeault, Bernheim, Beaunis et Liégeois à Nancy, ni MM. Fontan et Segard à Marseille, ni M. Forel en Suisse, ni M. Morselli en Italie, ne l’ont rencontré.

III

Cependant, il y avait encore une preuve à administrer : c’était de former un sujet qui pût rivaliser avec la Wittman. On conçoit qu’un praticien comme M. Liébeault, qu’un clinicien comme M. Bernheim, ne vont pas s’amuser à faire de leurs malades de curieuses pièces à démonstrations. D’ailleurs, l’un, par suite des circonstances, l’autre, par état, ne sont guère appelés qu’à soigner des pauvres ; et la complaisance d’un pauvre serait suspectée. La chance me procura un sujet qui réunissait bien des conditions désirables : c’est la personne qui m’a déjà fourni l’occasion de quelques communications dans la Revue de l’hypnotisme (mai 1887), et dont j’ai raconté sommairement l’histoire dans ma lecture faite le 4 juin de la même année à la classe des sciences de l’Académie royale de Belgique [3]. Je l’ai désignée par la lettre S.

Le lundi, 13 décembre 1886, se présenta chez moi une jeune demoiselle, grande, bien faite, aux traits énergiques, aux allures décidées, intelligente et instruite.

« Monsieur, me dit-elle sans autre préambule, je crois que je suis un bon sujet, et je viens m’offrir pour des expériences. - Expliquez-vous, lui dis-je, étonné. Mes expériences ne sont pas d’un genre réjouissant. Je brûle les sujets, je leur applique des vésicatoires..., de leur consentement, cela va de soi. L’avez-vous entendu dire ? -J’ai entendu dire beaucoup de choses. Vous n’êtes pas un inconnu pour moi. - En effet, je crois vous remettre. Vous avez habité la ville de... C’est là que je vous ai rencontrée. - Justement. Je me prêterai à ce que vous voudrez. Vous pouvez d’ailleurs me rendre peut-être un service. - Lequel ? - Me guérir. Enfant, on m’avait placée chez les sœurs. Un jour, pour un léger méfait, (j’avais alors dix ans) on me mit au trou. Oh ! les méchantes femmes ! Je pris rage et peur. À la suite de quoi je fus atteinte d’une forte chorée. II m’était impossible de marcher, de porter rien à ma bouche, de prononcer une seule parole. Je devins très colère ; je me livrais à des voies de fait contre les personnes dont je croyais avoir à me plaindre. Plusieurs docteurs de la ville me traitèrent et un mieux considérable se manifesta chez moi. À l’âge de quinze ans, comme je suivais les cours de l’école moyenne, la chorée m’attaqua de nouveau, mais avec moins de violence que la première fois. Néanmoins, je dus quitter l’école. Je fus à peu près guérie au bout de sept mois. Mais il m’est resté une grande agitation générale, une marche saccadée, une parole précipitée, une tendance aux syncopes et aux crises à la suite d’une impression quelque peu forte, et mon irritabilité est excessive. Pour un rien, j’entre dans des colères affreuses, et je ne suis plus maîtresse de moi-même [4]. Je m’adresse à vous, s’il est vrai, comme on dit, que par l’hypnotisme on peut modifier les caractères. - Avez-vous déjà été hypnotisée ? - Une fois, pour un mal de dents, par un ami de la famille. Il m’aurait fait croire que j’étais dans une forêt, et j’aurais marché. Je ne m’en souviens pas. - Avez-vous déjà vu des hypnotisés ? - Jamais, je n’en connais que ce qu’en disent les journaux. »

Je fais venir un de mes sujets, et je l’endors devant elle en un clin d’œil. « La voilà endormie ? me demande-t-elle. - Sans doute. » À l’instant, S. tombe de sa chaise à la renverse, et s’étend tout de son long par terre, remuant bras et jambes avec une vivacité sans égale. Je me précipite sur elle tout en criant à l’autre de se réveiller ; je la relève et la tire sans peine de sa crise en lui soufflant dans la figure.

Sur ces entrefaites, arrive mon ami le Dr de Rasquinet, qui depuis, à mon exemple, a pratiqué l’hypnotisme. Je lui raconte la scène. Je rendors S. devant lui. Nous tombons d’accord que ce pourrait être un sujet précieux, bien qu’elle ne soit nullement anesthésiée. Je conçois un plan d’expériences, et je lui demande si vraiment elle veut bien se prêter à quelques essais préliminaires. Elle y consent tout de suite. Je la prie de m’apporter l’approbation de ses parents, et je lui donne rendez-vous pour le jeudi suivant, 16 décembre.

Ce jour-là, je convoquai mes collègues, les docteurs Van Aubel, Swaen et Nuel, et les docteurs L. de Rasquinet et Henrijean, ce dernier assistant de M. von Winiwarter à l’université de Liège.

Je leur communique le plan de mes expériences. Elles ont pour objet de montrer que, par le dressage, on peut faire d’un sujet absolument neuf un somnambule semblable aux hystériques de la Salpêtrière.

Ce dressage a pris quatre heures en deux séances. Il a complètement réussi, sauf en un point sur lequel je m’expliquerai.

Tout d’abord, S. est-elle hystérique ? On l’interroge. Ses réponses ne révèlent aucun indice ; elle n’a jamais eu la boule ni le clou hystériques.

On la fait écrire, vite et lentement. L’écriture est nette et régulière ; les caractères sont en général bien tracés. Seulement, quand elle écrit vite, elle interrompt les liaisons après deux, trois ou quatre lettres, sinon la fin du mot se précipite. Tracée lentement, l’écriture est presque calligraphiée.

Léthargie et catalepsie. - Elle ne sait pas ce que c’est que la léthargie et la catalepsie. La léthargie, c’est pour elle l’image de la mort. Je lui explique la différence. Puis je l’endors en annonçant tout haut à l’assistance qu’elle va tomber en léthargie. C’est ce qu’elle fait. J’annonce ensuite que, si je lui ouvre les yeux, elle sera mise en catalepsie ; c’est ce qui arrive.

Avant comme après l’expérience, le pouls est à 100 environ. Très irrégulier : « Un de ces pouls, dit M. Nuel, qui peuvent battre de 50 à 150 à la minute. »

Le sommeil est peu-profond. Elle entend tout et se souvient de tout. J’annonce que le sommeil deviendra de plus en plus profond et le souvenir de plus en plus indistinct. Ma prévision se réalise.

Toujours par le même procédé, je produis ce que l’on appelle la paralysie et la contracture. La contracture, d’abord molle, finit par devenir ferme.

Insensibilité. - Il s’agit maintenant de la rendre insensible. Comme elle est excessivement douillette, je commence par lui attacher au bras des pinces qui n’ont que l’air de serrer fortement. Peu à peu, elle s’aguerrit. Se sentant piquée brusquement avec une brucelle à pointes, elle jette un cri et retire son bras. Après suggestion, elle se laisse piquer partout sans plus rien manifester. Je l’éveille.

On passe aux exercices avec la machine électrique. Le bruit seul l’agace et l’énerve. Elle ne peut même toucher les cylindres. Endormie, elle en supporte de mieux en mieux l’action.

Je lui colle la main au mur. Elle y adhère, mais non fortement. On l’en détache par force ; S. tombe en crise. Je note ses paroles : « On me fait manquer à un devoir ! » C’est une réflexion analogue qu’un jour un autre de mes sujets, M..., avait fait entendre à M. R. Boddaert, professeur à l’université de Gand. Il l’avait aussi arrachée violemment de la porte contre laquelle je l’avais appliquée. Elle est inquiète : « Monsieur l’avait dit ; que va dire Monsieur » ?

Attitudes passionnelles. - Je lui ferme les poings, sans rien dire. Elle reste impassible. Les traits de la physionomie ne se conforment pas à ce commencement d’attitude. Même indifférence, si je lui projette les poings fermés en avant. Pour lui faire oublier mes manœuvres, je la prends à mon bras ; elle fait le tour de la chambre, s’assied, est réveillée. Pas de souvenir.

Rendormie et mise en catalepsie par l’ouverture des paupières, j’annonce tout haut à l’assistance que, si je lui ferme les poings, toute sa figure manifestera une vive colère ; que, si je lui approche les mains de sa bouche, elle sourira et enverra des baisers ; que, si je lui joins les mains, elle priera et se jettera à genoux. Toutes ces prédictions se réalisent à la lettre.

Puis je passe aux états dimidiés : je produis, toujours par le même procédé de la parole, les états dimidiés, - léthargie à droite, catalepsie à gauche, si je tiens l’œil droit fermé et l’œil gauche ouvert.

Puis enfin je passe aux fameux états composés que l’école de la Salpêtrière, par l’un de ses organes les plus autorisés, met au défi d’obtenir avec les « somnambules vulgaires ».

Après quelques tâtonnements maladroits, S. parvient à exprimer parfaitement l’amour à droite, si l’on approche sa main droite de sa bouche, et en même temps la colère à gauche, si on lui ferme le poing gauche. Puis, relevant son œil droit et abaissant son œil gauche, je lui fis marquer la gaieté d’un côté, la tristesse de l’autre.

Le souvenir est de plus en plus aboli.

Somnambulisme. - J’annonce que si je frictionne le vertex elle ouvrira les yeux. Elle les ouvre, mais louche horriblement vers le haut. Je parviens, non sans peine, à la faire regarder droit. Je lui ferme les poings sans rien dire. Aucun effet.

Hallucinations. - J’essaie en vain de lui faire entendre une musique militaire « au loin, bien au loin ». Je la lui susurre à l’oreille : « Je l’entends, mais ici. » je lui offre à boire. Elle demande du café. Je lui donne de l’eau ; elle manifeste du dégoût.

Comme on le voit, le sujet n’est pas des meilleurs. Il y en a qui, au bout de dix minutes et moins, tombent en somnambulisme, ont des hallucinations de tous les sens, sont entièrement insensibles, et perdent absolument la mémoire. Mais la démonstration de la thèse n’en a été que plus éclatante.

On a arrangé une robe autour d’un mannequin. Devant S. éveillée, je donne à J... une hallucination. Le mannequin est un homme barbu qui veut l’embrasser. J... lui donne un soufflet et le renverse. S. rit de tout son cœur.

Je l’hypnotise à son tour, et lui montrant le mannequin : « Voilà un homme ! » Elle tâte la robe : « C’est vraiment du drap ! » je lui fais passer la main sur la barbe de l’homme ; elle ne la sent pas. J’approche ma barbe de sa main ; elle la touche. Geste de dégoût ; elle secoue ses doigts comme s’ils étaient souillés de vermine. Elle sent maintenant la barbe de l’homme, - même geste. L’homme veut l’embrasser. Cri d’effroi ; soufflet : « je ne suis pas une fille pour qu’on m’embrasse ! » Je la calme. Bal à grand orchestre. Elle entend les instruments, sent le parfum des fleurs, voit les danseurs ; ses jambes s’agitent, elle se lève et danse ; se rassied. Réveil, souvenir vague : « Il me semble que j’ai dansé. »

Cette partie de l’éducation de S. avait demandé près de deux heures.

IV

Le lundi suivant, 20 décembre, en présence de MM. Van Aubel, Swaen, von Winiwarter, L. Frédéricq et du Dr. Henrijean, toujours d’après un plan arrêté à l’avance, nous nous occupons de parfaire l’éducation.

Il est nécessaire de remémorer au sujet ce que c’est que la léthargie, la catalepsie, le somnambulisme. Elle a oublié en partie ses leçons - preuve de sa sincérité.

Les suggestions par attitude - par exemple, en lui fermant les poings, mais sans rien dire - ne sont suivies d’aucun effet. La contraction par électrisation des muscles des sourcils ou de la face, qui, chez les hystériques parisiennes, provoque les autres signes de la colère, du rire, de la tristesse, n’aboutit pas. Mais du moment que l’on joint la parole à l’action, la suggestion réussit.

Je ne relate que par désir d’être complet, les amnésies suggérées. - Impossibilité d’écrire son nom. Elle en écrit les trois premières lettres, s’arrête, et jette sa plume avec colère. - Impossibilité de tracer le chiffre 7. Elle écrit la série des nombres, en passant ce chiffre. Son irritation va croissant. À la quatrième dizaine, elle est tellement surexcitée que je dois la réveiller. Elle se souvient, elle est en colère contre elle-même, « parce que sa volonté est paralysée ; parce que, sachant écrire 7 et le voulant, elle ne le peut pas ». Cette impuissance la jette dans l’angoisse.

Je remarque à cette occasion que le sujet ici ne se croit pas libre, et se révolte même contre la contrainte qu’on lui impose. C’est le contraire de ce que soutient M. Beaunis. Mais il y a trop à dire sur ce point délicat. Je reprends le récit des expériences.

Amnésies systématiques. Ces amnésies sont curieuses en ce qu’elles montrent jusqu’où le sujet pousse la complaisance et la logique. On donne à S. un passage à lire ; seulement, elle ne pourra pas lire les verbes. Elle lit très vite, et passe sans broncher tous les verbes, sauf les participes employés comme adjectifs ; par exemple : un enfant bien élevé, un homme mal appris. Ceci montre à quel point de prestesse peut s’élever la faculté analytique d’un somnambule.

On lui défend de lire les s. Chose curieuse, elle lit les c et les x, et sur quinze lignes ne se trompe que trois fois : Auguste, Gallus, accusateur. M. von Winiwarter lui fait subir, pendant qu’elle est en somnambulisme, un interrogatoire instructif : « Pourquoi ne lisiez-vous pas les s, puisque vous saviez prononcer ce, ci, etc. ? - Je ne pouvais pas, c’était plus fort que moi —Vous étiez triste pendant l’expérience des chiffres ; pourquoi ? - Je sentais que je ne pouvais ce que je voulais. - Pourquoi écriviez-vous les autres chiffres ? - Parce qu’on me le permettait. » S. devient de plus en plus triste et se met à pleurer. « Pourquoi pleurez-vous ? - je ne peux faire ce que je veux. M. D. m’a défendu d’écrire 7. C’est malgré moi. Je suis triste à cause de l’inutilité des efforts que je fais. »

Transfert par l’aimant. - L’expérience réussit également bien avec de faux et avec de vrais aimants. J’annonce aux assistants que l’aimant fera passer l’écriture de droite à gauche. Elle écrit de la main droite : « À qui réserve-t-on ces apprêts meurtriers ? » -Aimant à droite : embarras visible, tristesse, désespoir. Tout à coup, la figure s’illumine : « J’y songe, je n’ai qu’à écrire de la main gauche. » Elle continue de la main gauche en écriture directe. (Relire, dans la Revue philosophique, les articles de MM. Féré et Binet : il y a là toute une savante théorie édifiée sur le fait que, par le transfert, l’écriture est renversée.)

L’écriture de S. devient de plus en plus régulière : « Pour qui ces torches qu’on excite ? L’airain sacré tremble et s’agite. D’où vient... » Ici, j’ajoute un aimant à gauche. Elle s’arrête embarrassée : « Je ne puis plus ! » M. von Winiwarter à moi : « Elle pourrait écrire avec ses dents. » Ainsi fait : « Ce bruit lugubre ». Inutile de dire que l’écriture est des plus imparfaites ; pourtant on reconnaît les mots. Alors nous jouons avec les aimants, et la plume passe avec eux de droite. à gauche, de gauche à droite et entre les dents.

La démonstration du transfert - non par l’aimant, mais par l’imagination - est faite. On la complète par quelques expériences sur les transferts des attitudes, des contractures, des paralysies. S. est devenue aussi habile que la Wittman.

Pour parfaire le récit des expériences faites ce jour-là, je n’ai plus qu’à mentionner quelques changements de personnalité. Des observateurs font grand état de ces phénomènes. Ils ne sortent pas des effets ordinaires de la suggestion.

Les somnambules sont d’excellents acteurs, et ils entrent vite dans l’esprit de leur rôle. Cependant, même à cet égard, une certaine éducation me semble indispensable. Il est parfois nécessaire de les guider, de les dresser.

Par exemple, nous faisons croire à S. qu’elle est une enfant de six ans qui va à l’école et qui écrit déjà bien sous la dictée. La suggestion lui est faite dans une chambre à côté de celle où l’on est assemblé. Elle entre, les doigts dans la bouche, l’air timide ; elle zézaie ; mais... elle a gardé sa marche cavalière. Elle se met à table et écrit d’une grande écriture d’enfant ; elle se penche comme les enfants et tire la langue de la bouche ; mais... elle oublie qu’elle devrait ignorer l’orthographe. Je fais tout haut la remarque que, pour une enfant de cet âge, elle connaît déjà parfaitement l’orthographe. Elle était, à ce moment, en train d’écrire le mot sept ; à l’instant, elle laisse le p inachevé.

La leçon ne devait pas être perdue. Nous faisons d’elle un paysan qui rédige la note des marchandises fournies à un client. Celui-ci attend. Elle écrit aussitôt d’une grosse écriture inégale, avec chiffres imparfaits :
 10 kilog beure à3 f = 30
 20 killo sirrob à 1 = 20
 100 hi pome 0,10 = 10
 30 paint let à 10 = 3
 Fr = 63

Quel progrès dans la cacographie !

Il peut arriver que le sujet n’ait qu’une idée imparfaite du rôle qu’on l’appelle à jouer. Ainsi nous lui disons qu’elle est un vieil usurier, et aussitôt elle rédige ce billet naïf :

« J’ai prêté à Thomas deux mille francs à vingt-cinq pour cent payables à trois mois. Mathurin.
Le 23 janvier 1888.
x

La croix est censée être la signature de Thomas.

Quant à la date, elle est tout à fait singulière.

Inutile de multiplier les exemples. Ceux-ci sont caractéristiques.

Dans la relation de ma Visite à la Salpêtrière (Revue de Belgique, 1886, 4e trimestre), j’ai parlé d’une théorie, encore en honneur dans certaines écoles d’hypnotisme, qui assimile le corps humain â un aimant ou à un système d’aimants. On aura compris que je n’y ajoute nulle créance. Mais il ne faut jamais rien nier à priori. On m’a raconté que Darwin, ayant un jour entendu parler de l’influence de la musique sur la germination des plantes, chargea quelqu’un - je ne pense pas que ce fût un virtuose - de jouer du basson pendant plusieurs jours consécutifs devant des graines de haricot mises en terre. Je ne connaissais pas l’anecdote et je ne sais si elle est vraie. Mais je serais capable de jouer, non du basson, instrument que je ne connais pas, mais du tambour ou de l’orgue de Barbarie devant la lune même, si l’on me soutenait qu’elle y est sensible.

J’ai donc voulu m’assurer encore une fois (voir mon article de la Revue de l’hypnotisme, juin 1887) si l’aimant ne produirait pas quelque chose sur S, en dehors de toute suggestion.

Je la fis revenir pour cet objet le lundi 27 décembre, et avec mon collègue, M. Swaen, professeur d’anatomie à l’université de Liège, nous procédâmes à des expériences systématiques, et absolument concluantes dans le sens négatif - en ce qui concerne S [5]. Pour ces sortes d’essais, la plus grande circonspection est requise. Les sujets se demandent ce qu’on leur veut, devinent et se hasardent. L’opérateur obtient-il ce qu’il attend, ou seulement même s’imagine-t-il que le phénomène a une signification physique et répond à une loi physique, s’il ne se défie pas de lui-même, il guidera, sans le savoir, ses sujets dans la voie qu’il désire leur voir prendre, et l’on a alors le spectacle de personnes qui, de très bonne foi, se dupent l’une l’autre.

Il y a à Paris un établissement où l’on traite les malades avec des aimants ingénieusement combinés. Il va sans dire qu’on peut y obtenir des guérisons de même qu’on en obtient à Lourdes et dans d’autres endroits miraculeux. C’est, en pareil cas, le malade qui se guérit lui-même. L’application des aimants est une manière de suggestion, qui présente même cet avantage d’avoir un côté mystérieux et un côté scientifique.

Par là, elle a prise et sur les esprits superstitieux et sur les esprits cultivés.

Restaient les phénomènes neuro-musculaires. C’est encore à l’obligeance de mon ami, M. Swaen, que j’eus recours. Voici comment nous procédions. S. étant endormie, nous commencions par électriser différents muscles de manière à obtenir certaines positions des membres, par exemple ce que l’on nomme la griffe cubitale, qui consiste dans un certain arrangement des doigts de la main ; puis nous touchions ces mêmes muscles avec un crayon en annonçant au sujet que cet arrangement allait se reproduire.

Nous avons travaillé deux ou trois jours à ce nouveau genre d’éducation, et sans succès. Le sujet n’a jamais compris ce que nous lui voulions.

D’après ce que j’ai vu à Nancy, je suis porté à croire que notre procédé était par trop savant. D’un autre côté, comme je ne suis pas anatomiste, il est possible que les phénomènes dont j’ai été le témoin à la Salpêtrière n’ont pas le degré d’étrangeté que je m’imagine, et que j’ai voulu faire exécuter à S. ce que la Wittman elle-même ne fait pas. J’y reviendrai plus loin.

Comme je l’ai raconté il y a deux ans, MM. Bernheim et Beaunis, à Nancy, avaient fait des expériences analogues, relatées dans leurs ouvrages, ayant pour but de montrer l’inanité des merveilleux phénomènes de la Salpêtrière. On ne s’est pas fait faute de leur objecter qu’opérant avec des « somnambules vulgaires », ne présentant pas les trois états et tout ce qui s’ensuit, leurs insuccès ne prouvaient rien.

Les expériences que je publie en détail aujourd’hui pour la première fois ne donnent pas prise à cette objection. Ici, sous les yeux d’hommes de la plus haute valeur scientifique, tout pénétrés de défiance et prévenus de ce qui allait se faire, un sujet médiocre a été dressé en quelques heures de manière à reproduire les fameux trois états, et les états dimidiés, et les états composés, et les phénomènes de transfert ; puis ce même sujet repris dans de nouvelles conditions, appelé à se prononcer entre de faux et de vrais aimants, non seulement bat la campagne, mais manifeste clairement le désir d’apprendre à répondre juste.

Il est encore une circonstance sur laquelle je reviens : c’est que, quand j’ai fait ces expériences, à la fin de 1886, il y avait à peine un an que j’étais revenu de Paris, et je les faisais, non dans le but de fortifier les opinions de l’école nancéenne, mais dans celui de m’éclairer moi-même. Elles donnent tort aux uns et raison aux autres. Ce n’est pas ma faute, j’aime à le croire ; c’est que les faits sont tels. Or s’obstiner contre des faits, c’est vouloir déplacer le mont Blanc à la force des bras.

Voir en ligne : Le magnétisme animal - Section II : La clinique de M. Liébeault

P.-S.

Texte établi par Abréactions Associations à partir de l’ouvrage de Joseph Delbœuf, Le magnétisme animal, À propos d’une visite à l’école de Nancy, Éd. Félix Alcan, Paris, 1890.

Notes

[1Rappelons que le sujet est en léthargie, c’est-à-dire que ses membres prennent la position déterminée par la pesanteur, quand il a les yeux fermés ; qu’il tombe en catalepsie, c’est-à-dire que ses membres gardent la position qu’on leur donne, si on lui ouvre les yeux ; qu’il entre en somnambulisme, c’est-à-dire qu’il est en communication partielle ou complète avec le monde extérieur, si on lui frictionne le vertex (le sommet de la tête).

[2Lettres à M. Thiriar, représentant, sur la liberté des représentations publiques d’hypnotisme. Liège, Desoer, 1888, p. 29.

[3Sur l’origine des effets curatifs de l’hypnotisme. Paris, Alcan, pp. 33 et 34.

[4Pendant que je la traitais, un jour, à l’heure de midi, dans une rue très fréquentée, passant devant des ouvriers qui causaient à l’entrée d’une impasse, elle entendit l’un d’eux faire une remarque désobligeante sur sa tournure. Elle n’y prit pas garde d’abord, mais elle n’avait pas fait douze pas qu’elle se retournait et allait appliquer un soufflet sur la joue de l’insolent. Celui-ci fut tellement ahuri ainsi que ses compagnons, qu’ils lui ont laissé continuer sa route. Après, elle était fâchée de sa conduite, mais il était trop tard.

[5Voici brièvement la relation de ces expériences, qui n’ont encore été publiées nulle part :
A. - Le bras droit est contracturé par suggestion.
1. On approche le pôle sud d’un aimant du côté externe du bras gauche près du petit doigt. - Contracture de tout le bras gauche, mais persistance de la contracture au bras droit. (Rapprocher de l’expérience que j’ai faite à la Salpêtrière avec la Parisienne.)
2. Même manœuvre. - Contracture avec agitation dans le bras gauche, décontracture du bras droit. - Transfert.
3. Même manœuvre cette fois-ci avec un faux aimant. - Agitation dans le bras gauche sans contracture ; décontracture du bras droit.
II résulte déjà de ces trois expériences que le sujet se met l’esprit à la torture pour deviner ce qu’on peut bien lui vouloir.
B. - Le bras gauche est contracturé par suggestion.
4. Même manœuvre du côté droit avec le faux aimant. - Transfert complet.
5. Même manœuvre avec le pôle sud d’un aimant. - Transfert complet.
6. Même manœuvre avec le pôle nord. - Transfert complet.
C’est concluant. Je rappelle qu’à la Salpêtrière, il n’y avait même pas de faux aimant comme instrument de contrôle.
C. - Bras droit contracturé par suggestion.
7. Application du pôle sud d’un aimant au côté interne du même bras. - Décontracture.
8. Application du faux aimant au bras gauche, côté externe. - Transfert.
9. Application du faux aimant au bras gauche, côté interne. - Décontracture.
Même conclusion que plus haut.
D. - Bras gauche contracturé par suggestion.
10. Application du faux aimant au bras droit, côté externe. Transfert. (cf. 8.)
11. Application du faux aimant au bras droit, côté interne. Transfert. (of. 9.)
E. - Bras droit contracturé par suggestion.
12. Application du pôle sud d’un aimant contre le bras gauche, côté externe. - Rien. (cf. 7.).
13. Application du pôle nord. - Rien.
14. Application du faux aimant. - Rien. (cf. 8.).
Il est démontré, sans qu’il puisse rester l’ombre d’un doute, que le sujet se fait des auto-suggestions.

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