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Mythopologie

Tout se passe dans l’Inconscient ?

Intervention au « Salon du livre psy » (Espace Reuilly : 28 novembre 2004)

Date de mise en ligne : samedi 2 avril 2005

Auteur : Christophe BORMANS

Tout se passe dans l’inconscient, parce que tout passe par l’énigme ! Si ce que l’on appelle « souffrance », « malheur », aussi bien que « bonheur » ou « bien-être », ne constituaient pas, pour chacun d’entre nous, une énigme... Hé bien, force est de reconnaître que nous ne serions pas là... Nous ne serions pas là au « Salon du Livre psy », à chercher des réponses, ne serait-ce que sous la forme de livre !

Un livre pour nous délivrer... Des réponses donc, dont on souhaiterait, - il faut tout de même l’avouer -, dont on souhaiterait qu’elles soient les plus simples et les faciles possibles.

Mais méfions-nous ! Pourquoi ? Parce que - justement - c’est en répondant un peu trop facilement à une énigme, qu’Œdipe entre de plain-pied dans son propre mythe, dans la destinée qui porte désormais son nom.

Parce qu’en effet, le temps, le moment crucial du mythe d’œdipe, c’est bien sa rencontre avec la Sphinge (le Sphinx) de Thèbes. C’est-à-dire que le temps déterminant c’est bien celui de sa confrontation à l’énigme.

I. - Le destin d’Œdipe

Je vous rappelle que, auparavant, (avant de rencontrer la Sphinge, l’énigme), Œdipe, qui est un enfant adopté, commence à avoir des doutes sur sa véritable identité. Un corinthien lui révèle (dans une querelle d’adolescent), qu’il serait un enfant adopté... Qui d’entre-nous ne s’est pas un jour posé cette question ?

Alors pour le savoir, pour savoir si c’est vrai - pour en avoir le cœur net, comme on dit -, il va consulter l’oracle. Il consulte quoi !

Et l’oracle lui dit : « Tu vas tuer ton père et épouser ta mère ! » Drôle de réponse, n’est-ce pas ? Enfin, on ne consulte pas pour que l’on nous réponde ça ! On paye assez cher ! Sauf que là, c’était gratuit. Mais enfin : il fallait quand même se déplacer, aller jusqu’à Delphes, ce n’est pas la porte à côté ! (La porte à côté de Corinthe à l’époque !)

Et justement, c’est important de se déplacer, parce que sur le chemin du retour, un peu déçu, Œdipe cogite... Enfin c’est incroyable ce qu’on peut cogiter sur le chemin du retour, quand on revient de chez le psychanalyste !

Sur le chemin du retour donc, Œdipe cogite et croise un char (une voiture de l’époque), et il s’engueule avec l’automobiliste ! Là à un feu rouge, si vous voulez, à un carrefour : celui dit de Mégas ! Ils en viennent rapidement aux mains, et Œdipe le chope par le « colback », et puis... Hé bien, et puis l’automobiliste casse sa pipe ! (Il était cardiaque, je ne sais pas quoi !) Bon, enfin voilà : il casse sa pipe !

Remarquez bien que je ne vous le souhaite pas : Traversez bien dans les clous en revenant de chez le « psy » et surtout baissez la tête : ne répondez pas aux provocations des automobilistes !

Après ça, Œdipe, qui ne souhaite pas - bien évidemment -, accomplir le destin prédit par l’oracle, ne préfère pas renter chez lui : il bifurque, et se rend dans une ville voisine, Thèbes en l’occurrence. Et là, à l’entrée de la ville, perchée sur un rocher, il rencontre la Sphinge ! La Sphinge, c’est un monstre féminin, moitié lion moitié serpent et qui possède en outre des ailes et des serres comme un oiseau de proie... Et la Sphinge terrorise les passants, en leur posant des énigmes auxquelles ils succombent les uns après les autres, puisque n’y répondant pas correctement, la Sphinge les dévore uns par un.

Mais œdipe, lui, répond correctement à cette énigme et, de dépit dit-on, le monstre se précipite du haut de son rocher, et meurt.

Les Thébains - qui lui sont reconnaissants d’avoir délivrer la ville du monstre -, lui donne alors pour épouse l’ancienne femme du roi Laïos, à savoir Jocaste, qui n’est, on le saura plus tard, que sa propre mère ! Et Œdipe apprendra du même coup, que l’homme qu’il avait tué au carrefour de Mégas n’était autre que son propre père.

Voilà, c’est donc en répondant à l’énigme que tout bascule : auparavant, non seulement il n’a pas encore épousé sa mère, mais en outre, s’il a tué son véritable père, il reste qu’il n’a aucun moyen de le savoir ; il reste vierge d’esprit, innocent du parricide, pourrait-on dire.

II. - L’énigme : « Quel est l’être... ? »

Alors, qu’est-ce que c’est que cette énigme ? Hé bien l’énigme que la Sphinge de Thèbes pose à Œdipe est la suivante : « Quel est l’être qui, le matin, marche à quatre pattes, le midi sur deux pattes et le soir sur trois ? »
 Facile, répond œdipe : c’est l’homme !

« Facile », oui, mais j’aimerais cependant attirer votre attention sur ceci : que cette énigme est finalement insoluble ! Insoluble sans la dimension de l’inconscient !

L’énigme est en effet insoluble, pourquoi ?

L’énigme est insoluble à la prendre dans ses deux dimensions courantes qui sont celles du corps et de l’esprit. C’est ce que les Américains ont coutume d’appeler un « double-blind » (ou « double aveugle »), et que nous connaissons traditionnellement sous la forme du célèbre : « la bourse ou la vie ».

C’est-à-dire qu’il y a deux solutions apparentes :
 Soit vous ne répondez pas - vous restez dans le mutisme du corps -, et alors vous vous faites dévorer par le monstre ;
 Soit vous répondez - en tentant de faire preuve de votre force d’esprit -, mais alors-là de deux choses l’une :
• soit vous répondez incorrectement, et vous êtes tout de même dévoré,
• soit vous répondez correctement, et vous rejoignez l’horreur de l’inceste et du meurtre du père.

Autrement dit, à ne saisir l’énigme qu’en tenant compte de ces deux dimensions du corps (physique) et de l’esprit (intelligence), ou, pour le dire autrement, de la libido maternelle et de la libido paternelle, l’énigme aspire tout sujet dans un tournage en rond névrotique, où la souffrance de l’esprit obsédé a son pendant dans le symptôme physique de l’hystérique.

L’énigme ne s’accroche pas, elle ne fait pas nœud (elle n’existe pas au sens de consister), sauf à prendre en compte, à introduire une troisième dimension : celle de l’inconscient. C’est cette troisième dimension qui permet de faire consister l’énigme !

C’est là ce qu’illustre à merveille le nœud borroméen :

Alors l’énigme des pattes, n’est-ce pas, c’est l’énigme de l’homme ! Car cette énigme porte donc sur l’homme et la manière dont - toute sa vie - il a à se dresser ou essayer de se redresser, c’est-à-dire que c’est l’énigme de l’érection de l’homme, autrement dit l’énigme de sa jouissance !

Ça c’est pour les hommes, n’est-ce pas, ça parle tout de même moins aux femmes...

III. - L’énigme : « Ce sont deux sœurs... »

Mais pour les femmes, il y en a une autre énigme. C’est la suivante : « Ce sont deux sœurs, dont la première engendre la seconde et la seconde à son tour engendre la première ? »
 Réponse : « Le jour et la nuit ! » Parce qu’en Grec, le jour est, comme la nuit, également féminin.

Alors qu’est-ce que ça veut dire ? Hé bien là, c’est l’énigme des filles : Qu’est-ce qu’être engendré par la mère pour devenir ensuite mère à son tour ?

C’est une énigme pour les filles, une énigme qui peut faire des ravages.

L’énigme est également très bien présentée au chapitre III du Livre des Rois (versets 5 à 16, puis verset 16 à 28). C’est ce qu’on a coutume d’appeler le Jugement de Salomon :

Ce sont deux femmes qui se disputent un enfant et qui viennent trouver le roi Salomon. Ces deux femmes habitaient ensemble dans la même maison, dans la même chambre et, leurs maris étant absents, elles ont accouché, seules et à peu près en même temps.

Remarquez bien ici - même si on ne le dit pas -, que deux femmes qui habitent dans une même maison, dans la même chambre, c’est là encore, soit deux sœurs (comme dans le mythe Grec) soit : une mère et sa fille.

Or, durant une nuit, l’une des femmes, dans son sommeil, serre un peu trop son fils et celui-ci meurt d’étouffement. Mais, dans le silence de cette nuit profonde, la femme se lève et, pendant que l’autre dort, elle lui vol son fils vivant et laisse à la place son propre fils mort.

Au matin, la femme qui trouve le fils mort, au beau milieu de son chagrin, pense tout de même reconnaître que ce n’est pas le sien et croit comprendre ce qui s’est effectivement passé pendant la nuit ; mais la première, bien évidemment, ne veut rien en savoir.

Les voilà donc toutes les deux qui viennent devant le roi Salomon, chacune disant à l’autre : « Mon fils est vivant le tien est mort » !

Voilà, alors que faire ? Pouvez-vous faire preuve d’intelligence, d’une quelconque perspicacité d’esprit ? Ou voulez-vous vous baser sur un quelconque signe physique distinctif ? Que vous vous situiez du strict point de vue du corps ou du strict point de vue de l’esprit, l’énigme est insoluble !

Sur un nœud, l’enfant vivant n’est pas serré correctement, il n’existe pas, aucune femme ne l’accroche véritablement !

L’énigme ne peut se résoudre qu’à faire intervenir la dimension de l’inconscient, la coupure de l’inconscient, la castration symbolique en l’occurrence. C’est ce que fait le roi Salomon :
 Le Roi, en effet, s’exclame : « Apportez une épée » et « coupez en deux cet enfant qui est vivant, et donnez-en la moitié à l’une, et la moitié à l’autre ! »

Sur ce, l’une des femmes supplie de ne pas tuer l’enfant, tandis que l’autre se satisfait de cette justice meurtrière et aveugle qui les rendraient toutes deux sur un même pied d’égalité. Alors le roi Salomon ordonne évidemment de donner l’enfant à la première femme, la reconnaissant comme la véritable mère !

L’inconscient est-ce la mort ? Certainement pas, c’est la castration symbolique, qui permet de nouer ensemble le corps et l’esprit de manière harmonieuse et, ainsi, de pleinement s’épanouir, hors du doute, du mensonge, ou de la fausse bonne conscience, de la fausse justice.

On peut observer en outre, que c’est au réveil d’un rêve fabuleux (que l’on n’analysera pas ici) que Salomon eut cet éclair de lucidité, cet acte véritable, sans lequel il lui aurait été impossible de trancher l’affaire !

Alors voilà, sans prendre sérieusement en compte la dimension de l’inconscient - dont la voie d’accès royale est le rêve -, il est absolument impossible de résoudre la moindre énigme qui vaille le coup ! Vous pouvez répondre à des petites questions conscientes, pallier des petits problèmes physiques, mais pour ce qui est de la véritable jouissance, c’est impossible !

Qu’il s’agisse de l’énigme, spécifiquement féminine, de l’enfantement, ou qu’il s’agisse de l’énigme de l’érection de l’homme : Oui, tout se passe dans l’inconscient ! Mais il serait peut-être plus juste de dire : rien ne se passe sans l’inconscient.

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