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Édito

Sarkozy, Schreber et le peer-to-peer

Pourquoi ne déchargez-vous donc pas ?

Date de mise en ligne : samedi 11 février 2006

Auteur : Christophe BORMANS

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La récente déclaration du Président de l’UMP concernant le téléchargement par voie de peer-to-peer m’interpelle à double titre : en tant que docteur en économie d’abord - puisque c’est mon titre et qu’il se rappelle soudain à mes bons souvenirs -, et en tant que psychanalyste ensuite, c’est-à-dire d’une manière, ici, tout particulièrement a-titrée.

Dans son discours au Théâtre du Palais-Royal, le mardi 24 janvier 2006, Nicolas Sarkozy, Président de l’UMP a déclaré :

« Le téléchargement illégal par voie de peer-to-peer n’est pas une économie de l’échange ou du partage, car en l’espèce celui qui “donne” ne se dépossède en réalité de rien » [1].

La conséquence en est, selon le Ministre de l’intérieur et de l’aménagement du territoire, que la licence globale irait « à l’encontre de la diversité culturelle » et serait « économiquement inconciliable avec la création et avec le développement d’une offre légale riche et diversifiée ».

Or à première vue, c’est plutôt sa propre déclaration qui va « à l’encontre » d’une bonne compréhension de ce qu’est l’économie et qui est « inconciliable » avec sa dynamique fondamentale.

Minne-hystère de l’économie

Comme l’a rappelé Anne Pigeon-Bormans dans son éditorial du 27 janvier dernier [2], l’économie est une science de la valeur et non pas de l’usage ; ce dernier ressort du Droit, non de l’économie.

À cet égard et du strict point de vue de la valeur, la règle économique aussi fondamentale qu’incontournable est que loin de devoir se « déposséder », l’obligation est faîte de toujours en ajouter : c’est la fameuse valeur ajoutée ou plus-value. Si vous n’ajoutez pas de la valeur à une chose, disons plus rigoureusement à un bien matériel ou à un service, vous êtes, pour le coup, dans l’illégalité : vous sortez du cadre de l’économie d’échange tel qu’il est défini depuis maintenant presque trois siècles par la science économique et tel qu’il fait autorité en matière politique et juridique.

Pire - et allant là à l’exact opposé de ce que nous laisse entendre Nicolas Sarkozy -, c’est précisément « se déposséder » de quelque chose, en l’occurrence d’une valeur, qui précisément est illégal. C’est pour cela que le dumping, les subventions abusives de l’État, sont des pratiques sans cesse mises en cause et réprimées, et que les soldes sont strictement encadrées.

C’est un comble qu’un ancien Ministre de l’Économie et des finances fasse ici preuve d’une si grande méconnaissance des rouages essentiels de l’économie de marché.

Si les maisons de disques peuvent vendre légalement, c’est bien parce qu’en offrant leurs produits (qu’elles se dépossèdent matériellement ou non d’un support n’y change rien), elles font une plus-value, elles accroissent la valeur de départ. Dans le cas contraire, c’est-à-dire si elles « se dépossédaient », elles devraient être déclarées illégales.

La déclaration de Nicolas Sarkozy semble par conséquent totalement hors de propos, pour la simple et bonne raison qu’avec le P2P, on ne peut nullement raisonner en termes économique, puisque nous ne sommes tout simplement pas dans la sphère de la valeur, mais dans celle de l’usage.

Cependant, nous touchons là à un problème aussi ancien qu’épineux : celui de l’antique résistance à l’économie de marché, laquelle doit être imposée par l’État ou sans cesse risquée de capoter. Et contrairement à ce qu’en pensent les alter-mondialistes, la véritable dynamique de la société n’est pas tant donnée par l’économie de marché, que par la résistance à y entrer, à se « défaire » justement de l’usage.

Qu’on relise un ouvrage tel que La Grande transformation de Karl Polanyi (Gallimard, Paris, 1972), publié au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ou l’oeuvre entière d’un Joseph Schumpeter, qui, au beau milieu du vingtième siècle, assénait déjà qu’un socialisme mou et bureaucratique menaçait la dynamique entière de l’économie de marché et aurait tôt ou tard implacablement raison d’elle.

Je rappellerai simplement ici que c’est à coup de trique qu’à la fois en Angleterre avec le système de Speenhamland et l’interdiction de la mendicité, aux États-Unis avec Henri Ford et le « 5 dollars-day », ou en France avec le « Livret ouvrier », qu’on arrive à arracher les hommes, la terre et les marchandises, au domaine paradisiaque qu’est celui de la valeur d’usage. En aucun endroit du monde et de l’histoire, l’économie de marché ne s’est spontanément développée. Partout et en tous temps, c’est la résistance qui a primée, et il serait temps de comprendre que c’est la résistance qui prime encore, et qui imprime, véritablement, sa dynamique à la société.

Pourquoi ? Précisément, parce que ce dont il s’agit dans l’économie de marché, c’est de se « déposséder », mais non pas d’une chose, d’une valeur, ou d’un usage particulier, mais bien d’une sphère, celle de l’imaginaire de la valeur d’usage, et je dirai désormais, de la sphère maternelle.

La véritable dynamique de la société est une dynamique de résistance, la résistance à se défaire de la sphère imaginaire et maternelle, afin d’entrer dans la sphère symbolique de l’échange. Ce dont, au-delà du salariat, la pratique des achats par tickets de comités d’entreprise et des vacances clés en mains, la pratique généralisée des tickets restaurant (laquelle, dit au passage, est la cause d’une inflation démesurée dans les commerces de proximité, boulangeries, vendeurs de sandwichs et autres petits restaurants), etc., autant de pratiques qui témoignent de nos jours, que le don contre don, avec toute l’allégeance que cela suppose, justement, à la figure de ce nouveau monstre maternel qu’est l’entreprise, est largement préféré à l’échange symbolique.

Cette résistance n’est pas nouvelle, puisqu’elle a déjà son pendant dans l’Écriture, au moment de la Genèse où Moïse, redescendant de la montagne - le son du Shofar à peine dissipé -, constate avec horreur que les richesses matérielles destinées à un usage symbolique par la nouvelle religion, sont finalement à nouveau fondues et confondues dans cette sphère maternelle de la valeur d’usage représentée ici par le Veau d’or. Les tables de la Loi en tombent des bras de Moïse, tout comme la Loi semble ici, aujourd’hui, à nouveau incapable de légiférer sur le statut de ce nou-veau monde de l’Internet.

Psychanalyse du pire et de l’objet a

En ce sens, la phrase de Nicolas Sarkozy peut s’entendre désormais différemment, bien qu’elle reste empreinte d’une confusion caractéristique de l’homme politique souhaitant ménager à la fois la chèvre (les Majors) et le choux (les internautes).

Cette phrase peut s’entendre désormais différemment, c’est-à-dire, précisément, comme : il est nécessaire de se « déposséder », de se défaire de la valeur d’usage, de se défaire de l’a-sphère maternelle. Oui mais pourquoi, autrement dit pour quel autre projet ? Assurément pas pour celui du discours mensonger des maisons de disques, car il n’y a pas là de véritable alternative à la sphère maternelle.

L’artiste ou le poète, comme l’a de nombreuses fois souligné Freud, n’est autre - dans l’inconscient -, qu’une figure fantasmatique du fils qui, s’imaginant avoir tué le père, se présente à nouveau devant la mère, représentée ici par la foule, dans l’espoir de ne plus faire qu’un avec elle. En faisant Un avec la foule, l’artiste moderne entend par-là - au prix d’un léger détour dans la sphère marchande -, retomber dans la sphère de la valeur d’usage, la sphère maternelle ; mais faisant Un avec son image au miroir, il ne cesse de régulièrement tomber, telle une sphinge tombant de son rocher, sur l’impossible réel sous-jacent à l’imaginaire, et le poussant en dernière extrémité au passage à l’acte : drogue, alcool, déchéance, mort prématurée par acte manqué (accidentelle) ou réussit (suicide), etc.

En se soutenant à la lettre du discours des artistes, le Ministre croit échapper à la perversion des maisons de disques, mais retombe à son insu dans ce qu’il entendait pourtant dénoncer maladroitement : la sphère maternelle. Sa déclaration n’en n’est que plus incompréhensible.

Cependant, il y a tout de même dans cette déclaration une subtilité qui ne doit pas nous échapper, c’est précisément le mot de la fin : « celui qui “donne” ne se dépossède en réalité de rien ».

Si d’un strict point de vue rationnel et économique, cette phrase est un non sens, il reste que dans l’inconscient, on dit toujours quelque chose, autre chose ; et si l’on entend « réalité » par « réalité psychique », c’est-à-dire « fantasme », nous sommes tout de même bien ramené ici à ce dont il s’agit dans le fantasme : au « rien ».

Con-gélateur et télé-chargement

Fût un temps - celui où il n’y avait pas encore Internet -, où il y avait cet appareil-roi, cette invention-reine, que depuis l’ordinateur a désormais balayé, repoussé au rang de vieillerie, et qui s’appelait le congélateur.

C’était (c’est toujours) un appareil extraordinaire ce congélateur. Je revois encore les bonnes ménagères des années soixante-dix congeler à tout va ! Congeler tout ce qui se trouvait sous leurs mains, congeler tout ce qu’il y avait de comestible. Emmagasiner pourrait-on dire : « On » se garde en prévision. C’est formidable ! Un imprévu, quelqu’un qui vient dîner à l’improviste, et puis il y a le congélateur : on en sort quelque chose et hop ! le tour est joué. C’est ce qu’on appelle un système de défense : un système de défense contre l’imprévu. C’est là, l’appât véritable : l’appât-raye.

L’appât-raye, parce qu’un jour, ça ne manque jamais d’arriver, ça s’en-raye justement. On congèle... On congèle... Et puis un jour, clac : coupure de courant ! Un fait exprès, ça tombe tout le temps quand on n’est pas là. Enfin, si par bonheur on est quand même là quand ça arrive, on se dépêche de refiler ça à la voisine, on se dépêche de remettre tout ça dans un autre congélateur. On appelle une bonne copine en vitesse, et on s’entend lui dîre :
 « Dis donc, Monique, mon congélateur est tombé en panne, je pourrai pas le mettre dans le tiens ? »

Sinon ça va se perdre ! Alors là c’est la panique : parce que soit on bouffe tout tout de suite, et on risque l’indigestion, ou pire le dégoût, soit... Eh bien, soit ça devient de la pourriture (la nourriture devient pourriture), et on met tout à la poubelle.

C’est le propre du système de défense, quand un système de « défense » vient à tomber en panne, c’est la panne-nique, et l’on se souvient bien qu’« encore en panne ! » furent les dernières paroles entendues par les sœurs Papin avant de passer à l’acte.

Le problème, c’est qu’à l’usage, on s’aperçoit que le fameux congélateur, eh bien il est toujours plein. On le « plein » tout le temps, et finalement, on ne le « vide » jamais. Que ce qu’on anticipait comme imprévu, ça n’arrive jamais, parce que l’imprévu ce n’est pas ça (qu’un copain se pointe), l’imprévu véritable, c’est justement quand ça tombe en panne !

« Pourquoi ne ch...-vous donc pas ? »

Alors, on congèle de la nourriture, bien sûr, mais pas que cela. Désormais, on congèle aussi de la musique : on la télécharge, et donc sur Internet. Seulement voilà : après, qu’est-ce qu’on en fait ? Eh bien « rien » justement ! Sinon, que de le refiler à quelqu’un d’autre, à son voisin, à sa voisine, bref, à quelqu’un qui veuille bien, lui aussi, congeler, télécharger, comme nous. C’est là, la seule manière qu’on ait trouver, en quelque sorte, de décharger...

Car « la grande transformation », la seule véritable nouveauté par rapport au congélateur, c’est qu’alors qu’avec le congélateur, lorsqu’on décongelait et qu’on le refilait à notre voisine, on se « dépossédait » effectivement de quelque chose, avec le P2P, au contraire, votre ordinateur-congélateur il est toujours plein, et ça c’est encore plus emmerdant.

C’est plus emmerdant, car le problème qui se pose, justement, est celui du « comment véritablement décharger ». C’est du reste l’un des problèmes fondamentaux qui se pose au célèbre paranoïaque Daniel Paul Schreber - éminent juriste tout comme Nicolas Sarkozy, faut-il le rappeler ? - qui lui, comme système de défense contre les voix qu’il entendait, n’avait pas trouver mieux que de les répéter... En d’autres termes il n’avait pas trouver mieux que de les apprendre par cœur, de les télécharger dans son « disque dur » à lui.

Et ces voix, dès lors, de n’avoir de cesse de lui poser cette question :
 « Pourquoi ne ch...-vous donc pas ? »

Et là encore, la « panne » - incompréhensible pour le moi imaginaire - ne peut finalement être envisagée que sous la forme de « miracles » :

« À cause de son importance caractéristique je dois consacrer quelques remarques au sujet de la question ci-dessus mentionnée : "Pourquoi ne ch...-vous donc pas ?” ; bien que le thème soit peu décent, je suis malgré tout ici contraint de l’aborder. Comme tout ce qui touche à mon corps, le besoin de me vidanger l’intestin est bien, lui aussi, provoqué par des miracles » (D. P. Schreber, Mémoires d’un névropathe, Chapitre XVI).

Avec ce corollaire, pour Schreber, qu’il fini par s’apercevoir que la véritable volupté est bien là, non pas tant dans le fait de télécharger (d’apprendre par cœur des voix, sous forme de poèmes, etc.), mais bien de décharger :

« Lorsque, vraiment en cas de besoin, je me vide [...] chaque fois [...] suit immédiatement un développement extrêmement intense des voluptés de l’âme. Le relâchement de la pression due à la présence de l’étron dans les intestins, entraîne en effet pour les nerfs de volupté un bien-être intensif ; et la même chose se produit également lorsque je pisse. En ce sens, l’union de tous les rayons sans exceptions se produit toujours dans et par la vidange des intestins et de la vessie » (Mémoires d’un névropathe, Chapitre XVI, Conclusion).

De l’union de tous les rayons de Schreber à l’Union pour une Major-ité présidentielle et des disques « lasers » des maisons de disques, il n’y a qu’un pas ! Et nous nous approchons bien ici de la paranoïa : aussi bien du côté des maisons de disques, persuadées d’être persécutés par des petits hommes faits d’esprit Internet, téléchargant à l’unisson comme autant de voix parlant à l’esprit malade de l’éminent juriste ; que du côté des internautes, congelant leurs voix sans pour autant jamais les décharger.

Car c’est bien de cela dont il s’agit dans la paranoïa, comme nous le rappellerons avec Lacan, d’un « engluement imaginaire » :
 « C’est la voix qui sonorise, le regard qui devient prévalent, c’est une affaire de congélation d’un désir » (RSI, 8 avril 1975).

À ceci près, que dans sa véritable folie (contrairement à celle tout à fait factice des Majors), Schreber a tout de même quelque appréhension du problème - du pourquoi de cet « engluement » - et l’énonce clairement dans sa libre association :

« Il me semble que l’on doit, pour comprendre la raison d’un tel phénomène, remonter à l’existence d’un malentendu originel dans l’objet-même de l’acte de vidanger et l’importance symbolique de cet acte » (Mémoires d’un névropathe, Chapitre XVI).

Car c’est bien de cela dont il s’agit ici : d’une incompréhension de l’importance du symbolique. Dans cette incapacité à légiférer d’une manière sereine dans ce domaine du téléchargement par voie de peer-to-peer, c’est l’imaginaire tout puissant des maisons de disques qui prend donc le pas sur le symbolique.

C’est cela que pointe le « ratage » de Nicolas Sarkozy lorsqu’il nous invite à la « dépossession » : il nous invite à nous situer sur le symbolique, alors même qu’il n’arrive pas à se départir de l’imaginaire « artistique », et il nous livre finalement une déclaration des plus molles - à laquelle il ne nous avait d’ailleurs pas habitué jusque-là.

Mais plus important encore, ce que Schreber pointe lui, c’est que ce « ratage » est de l’ordre d’un « ratage de la création » ; et il nous le dit tout de go, c’est parce qu’il s’imagine comprendre la création divine qu’il se croit autoriser à décharger sur le monde entier :

« Comme il me semble que l’on doit, pour comprendre la raison d’un tel phénomène, remonter à l’existence d’un malentendu originel dans l’objet-même de l’acte de vidanger et l’importance symbolique de cet acte, je pense par conséquent que celui qui serait parvenu à une relation équivalente à la mienne avec les rayons de dieu, serait en mesure de s’autoriser à “ch... sur le monde entier”. » (Mémoires d’un névropathe, Chapitre XVI).

Et c’est bien là qu’en sont les Majors, persuadées de comprendre, elles, la création artistique (qu’elle soit musicale, cinématographique, etc.), persuadées qu’elles sont d’en avoir le monopole de cette création, eh bien elles s’autorisent, à l’instar du délirant Schreber, à « ch... sur le monde entier ».

C’est donc une lutte vaine que celle des Majors contre le téléchargement, contre la congélation de la musique. Car si on télécharge de la musique (des voix), des films (du regard), bref de la pourriture quoi, des objets a, excréments, seins, etc., sur Internet, c’est, soyons-en assurés, pour ne rien en faire, ou plutôt, en faire « rien », ce « rien » étant l’immatérialité psychique dans laquelle se cristallise véritablement cet objet a.

Est-ce pour autant condamnable ou malsain ?
 Pas du tout !

Petit apologue pour conclure

Du moins, ce n’est pas ça qui est malsain, c’est autre chose. Et pour l’illustrer, je reprendrai ici le petit apologue dont Lacan se sert dans son séminaire sur Schreber et Les Psychoses (séminaire III), - et qu’il emprunte à Karl Abraham - pour nous faire comprendre que le « comportement normal », ce n’est pas du tout celui auquel on pense a priori.

Relisant l’article de Karl Abraham [3], où celui-ci décrit le comportement d’un dément précoce, Jacques Lacan commente la « dite inaffectivité » de la relation aux objets de ce malade :

« Le voilà qui pendant des mois a entassé, pierre sur pierre, des cailloux vulgaires qui sont affectés pour lui du plus grand bien. Or, à force d’en entasser sur une planche, celle-ci craque, grand fracas dans la chambre, on balaie le tout, et ce personnage qui semblait accorder tellement d’importance à ces cailloux, ne fait pas la moindre attention à ce qui se passe, n’élève pas la moindre protestation devant l’évacuation générale des objets de ses désirs. Simplement, il recommence, il va en accumuler d’autres. Voilà le dément précoce. » (J. Lacan, Le Séminaire, Livre III, Les Psychoses, Seuil, Paris, 1981, p. 29).

C’est là que le commentaire de Lacan est fulgurant pour le sujet qui nous occupe :

« De ce petit apologue, on aimerait faire une fable, qui montrerait que c’est ce que nous faisons tout le temps. Je dirais même plus - accumuler une foule de choses sans valeur, devoir les passer du jour au lendemain par pertes et profit, et recommencer, c’est très bon signe. C’est bien si le sujet restait attaché à ce qu’il perd, n’en pouvait supporter la frustration, qu’on pourrait dire qu’il y a là survalorisation des objets » (J. Lacan, Le Séminaire, Livre III, Les Psychoses, Seuil, Paris, 1981, p. 29).

Je laisse à chacun le soin d’en conclure sur les comportements qu’il pense être du ressort du Malaise dans la civilisation : celui des Majors, qui une fois que leur « planche » à eux ait craqué, c’est-à-dire une fois que leur support à eux (laser en l’occurrence : CD, DVD, etc.) les aient laissé tombé, crient aux loups en nous démontrant par là-même leur attachement névrotique et obsessionnel aux objets de leur économie libidinale anale dont ils sont finalement incapables de se défaire ; ou alors l’internaute qui, à l’instar du dément précoce de Karl Abraham, entasse toute la journée des « perles musicales » affectées pour eux, semble-t-il, du plus grand bien, même s’il semble également que ce soit finalement pour « rien ».

A priori, la réponse va dans le sens que le Malaise est indéniablement du ressort du premier comportement. Reste tout de même à savoir, la tête que fait notre interné-hôte lorsque la fenêtre de son fantasme (Windows en l’occurrence) en vient à se refermer - à le « laisser en plan » ou à le « planter » comme on dit -, avec tout ce qu’il avait jusque-là accumulé de « cailloux vulgaires » ! « Adieu veaux, vaches, cochons » !

J’entend d’ici Monsieur de La Fontaine :
 Vous téléchargiez ? ...
 Eh bien dansez maintenant !

Notes

[1N. Sarkozy, U-M-P.org.

[3Karl Abraham, « Les différences psychosexuelles entre l’hystérie et la démence précoce » [1908], Œuvres complètes, vol. I, Payot, Paris, 1965, p. 41-52.

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