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Guide pratique des maladies mentales

Idées érotiques

par P. Sollier

Date de mise en ligne : mercredi 23 janvier 2008

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P. Sollier, « Idées érotiques », Guide pratique des maladies mentales, Éd. G. Masson, Paris, 1893, pp. 341-349.

IDÉES ÉROTIQUES

Les idées érotiques, ou pour mieux dire, toutes les manifestations délirantes du sens génésique, se rencontrent fréquemment et dans des cas très divers. Généralement c’est dans des états d’excitation qu’on les voit survenir ou sous l’influence d’hallucinations ou de perversions sexuelles.

1° Dans la première catégorie, la plus nombreuse, se rangent les affections suivantes :
 1° Paralysie générale ;
 2° Excitation maniaque ;
 3° Manie puerpérale ;
 4° Épilepsie.

2° La seconde comprend :
 5° Folie mystique ;
 6° Délire de persécution ;
 7° Folie hystérique ;
 8° Démence.

3° La troisième catégorie comprend enfin :
 9° Érotomanie ;
 10° Perversions sexuelles.

1° Paralysie générale. — De tous les états d’excitation, la première période de la paralysie générale, est celui où l’érotisme est le plus marqué. Il se traduit non seulement par des idées et des paroles, mais encore par des actes. Les malades se livrent alors à des exhibitions obscènes (Voy. Exhibitionnistes), font de nombreux excès vénériens dont ils se vantent fort, et peuvent même se livrer à des attentats à la pudeur et à des viols.

Leur excitation génésique donne souvent lieu à des conceptions délirantes. Ils se croient capables de repeupler le monde, de posséder mille femmes dans une nuit, et autres prouesses du même genre. Ils ont à un moindre degré le sentiment de leurs attraits pour le sexe opposé. Ce sont surtout les hommes qui manifestent cette excitation génésique. Les femmes cependant n’en sont pas exemptes et on en voit de très honorables jusque-là se donner au premier venu. Plus tard, même, dans les dernières périodes, alors qu’elles sont complètement inconscientes de leur état, elles ne parlent encore de rien moins que « de se marier demain ».

Les conséquences de ces idées peuvent être sérieuses quand, se manifestant à une époque où la maladie peut passer inaperçue à des yeux non exercés, elles entraînent à des actes délictueux.

2° Excitation maniaque. — L’excitation maniaque simple ou symptomatique de la folie circulaire est, après a paralysie générale, l’affection où l’érotisme se montre le plus ; et là encore il dépend de l’excitation fonctionnelle générale. Il se traduit par un cynisme quelquefois outré chez les femmes, où il se manifeste toutefois en paroles plutôt qu’en actes. Il faut surveiller beaucoup les malades, hommes ou femmes, dont les appétits sont encore aiguisés par les obstacles et risquent toujours de compromettre leur réputation et leur honorabilité par quelque scandale.

L’excitation génésique se produit aussi dans l’alcoolisme aigu ou subaigu ; et chez les dipsomanes on observe quelquefois des tendances érotiques au môme titre que n’importe quelles autres impulsions.

3° Manie puerpérale. — La manie, et plus spécialement la manie puerpérale, s’accompagnent fréquemment d’idées érotiques. C’est même une des marques du délire puerpéral que ce caractère d’obscénité et d’érotisme. Dans la manie l’excitation génésique se traduit surtout par une masturbation quelquefois excessive. Il faut y prendre garde, car cet onanisme entretient la vésanie, amène une déchéance physique et intellectuelle plus rapide et détermine la chronicité et môme la démence précoce.

4° Épilepsie. — C’est surtout sous forme d’exhibitions obscènes (Voy. Exhibitionnistes) et de masturbation que l’excitation génésique se manifeste. Souvent, à la suite de leurs accès, les épileptiques se livrent à un onanisme automatique, machinal. Or on sait que le spasme cynique et la convulsion épileptique sont de même ordre. On comprend donc combien la répétition de ce spasme, épuisant les centres nerveux, et surajoutant ses effets aux convulsions épileptiques, exagère encore les troubles intellectuels de l’épilepsie et la rapidité de la démence. Lorsque l’onanisme se pratique après l’accès, l’épuisement s’aggrave ; lorsqu’il existe en dehors de l’accès il le provoque souvent, la convulsion se généralisant et prenant un caractère plus intense. D’où la nécessité pour les épileptiques d’éviter le plus possible tout excès vénérien et d’espacer même les rapports sexuels.

5° Folie mystique. — Il y aune sorte de corrélation intime entre le mysticisme et l’érotisme, mais seulement dans les formes excitées de la folie religieuse. Dans les formes dépressives au contraire, comme chez les damnés, on ne les rencontre pas. L’excitation génésique se montre surtout chez les femmes où l’amour de Jésus, leur divin amant, n’est guère basé que sur des illusions ou des sensations génésiques spontanées. Les malades sont incubes ou succubes, ont des relations avec Dieu, les archanges, les saints, etc. Leurs ravissements et leurs extases ne sont pas toujours d’ordre platonique, mais elles éprouvent — car ce sont ordinairement des femmes — des sensations génitales voluptueuses.

6° Délire de persécution. — Ici les hallucinations génitales sont, on le sait, très communes. On a même voulu voir chez la femme — où elles se rencontrent le plus — un antagonisme entre ces hallucinations et les idées de grandeur. Mais il n’en est rien, et de ce qu’on constate chez un persécuté des hallucinations génitales on n’est pas autorisé à dire qu’il ne versera pas dans le délire de grandeurs.

Au point de vue du pronostic cela n’a pas du reste grande importance puisque cette forme d’aliénation est absolument chronique.

Mais si ces hallucinations génitales sont intéressantes à constater, c’est plutôt au point de vue du diagnostic. En effet les délires de persécution d’origine toxique ne s’accompagnent guère d’hallucinations génitales aussi nettes, aussi précoces, aussi systématisées que celles du délire de persécution chronique. Ce qui importe, du reste, c’est la cause que les malades donnent aux sensations qu’ils éprouvent. Tandis que les mystiques les attribuent au surnaturel, les persécutés les attribuent à leurs ennemis terrestres. C’est toujours le côté persécution qui domine chez ces derniers et leurs sensations ne sont guère voluptueuses : on les viole, on leur tire du sperme, etc., etc.

Ces hallucinations peuvent avoir aussi une importance médico-légale considérable, car les malades portent fréquemment des accusations de tentatives immorales contre des personnes honorables et en particulier les médecins, les dentistes, qui ont à les traiter. Généralement cependant l’invraisemblance des circonstances dans lesquelles l’acte reproché aurait été commis, montre qu’on est en présence d’aliénés.

Certains persécutés présentant des rémissions et des accès d’excitation deviennent tout à coup obscènes et érotiques, en dehors môme d’hallucinations génitales. Ils se livrent, surtout devant le sexe opposé, à toutes sortes d’actes cyniques et provocateurs, à des gestes et des attitudes obscènes.

Hystérie. — Certaines hystériques ont des tendances érotiques assez accusées. Elles formulent alors souvent des accusations auxquelles leurs hallucinations fournissent une certaine base et sur lesquelles leur imagination brode tout un roman, quelquefois assez habilement construit pour donner le change. Aussi est-il de la plus élémentaire prudence de ne jamais examiner une hystérique — femme ou jeune fille — seul dans son cabinet. Il est du reste absolument erroné de dire que l’hystérie et l’érotisme marchent de pair. C’est une vieille idée basée sur une pathogénie archaïque plaçant le siège de l’hystérie dans les organes génitaux, et qui malheureusement trouve encore des adhérents, non seulement dans le vulgaire, mais même chez des médecins, qui n’hésitent pas, quelquefois, à pratiquer la section de l’hymen ou la clitoridectomie chez des vierges, quand, même, on ne fait pas l’ovariotomie, toutes pratiques qui non seulement, sont inutiles mais préjudiciables aux malades en renforçant leur idée erronée sur l’origine de leur affection en attirant leur attention sur leurs organes génitaux. Aussi en voit-on fréquemment qui veulent à tout instant, sous le plus futile prétexte, se faire examiner au spéculum, sollicitations auxquelles il est plus prudent de ne pas céder.

Quant on constate chez une hystérique des tendances érotiques il faut, au contraire, en les traitant, attirer toute leur attention, d’un autre côté.

8° Démence. — Les déments séniles ont souvent, au début de l’excitation sexuelle. C’est alors qu’ils se livrent à des exhibitions obscènes (Voy. Exhibitionnistes) et qu’ils cherchent dans des pratiques anormales une excitation factice pour leurs organes impuissants à satisfaire leurs désirs. C’est aussi sous cette influence qu’on les voit commettre des attentats à la pudeur, des viols, se livrer à la pédérastie et à toutes les perversions sexuelles possibles.

Érotomanie. — Les érotomanes vrais sont le plus, souvent des platoniques, des extatiques, des mystiques d’un genre particulier, auxquels même l’idée charnelle répugne. Ils ont un culte idéal pour une personne d’une situation au-dessus de la leur ou même pour un être imaginaire. Mais quelquefois aussi ils deviennent de vrais persécuteurs pour l’objet aimé qu’ils finissent par compromettre et sur lequel ils se livrent parfois à des attentats, au crime même, s’ils arrivent à s’en rapprocher. Ils tuent alors la personne qu’ils adorent pour qu’elle n’appartienne à personne d’autre qu’à eux, et se suicident souvent ensuite ; ou d’autres fois ils se suicident avec elle.

Ce sont ordinairement des dégénérés héréditaires, chez lesquels l’érotomanie survient par accès irréguliers.

Leurs actes, qui les amènent souvent devant la justice, sont quelquefois très délicats au point de vue médico-légal, comme tous ceux du même genre, du reste, qui sont sur la limite de la raison et de la folie, et pour lesquels il est plus sage et plus prudent de faire intervenir des hommes spéciaux, si l’on ne veut s’attirer aucun ennui, ni encourir de responsabilité trop grave.

10° Perversions sexuelles. — Il nous reste à parler des obsédés, des impulsifs, des individus qui ont des tendances contre nature, des perversions ou de l’inversion sexuelles (nymphomanie, tribadisme, pédérastie, bestialité, etc., etc.). Nous n’insisterons pas sur ces troubles qui le plus souvent échappent à l’investigation du médecin, et qui ne sont guère mis en évidence que lorsque des circonstances spéciales attirent l’attention sur eux, en particulier lorsqu’ils ont entraîné des conséquences judiciaires, et que les sujets sont soumis à un examen médico-légal. Ce que nous disions à propos des érotomanes est encore plus applicable ici peut-être, car ces perversions sexuelles sont fréquemment isolées et non combinées avec d’autre manifestations de la dégénérescence mentale, comme l’érotomanie. Entre le vice et l’impulsion à certains actes contraires à la nature et à la morale il est très souvent difficile de se prononcer.

ONANISME. — L’onanisme se rencontre si souvent dans les états psychopathiques que nous le signalons d’une façon spéciale à l’attention.

On le rencontre dans :
 Idiotie et imbécillité ;
 Débilité mentale ;
 Dégénérescence mentale. Perversions sexuelles (surtout les enfants) ;
 Épilepsie (avant et après l’accès.) (Voy. plus haut, page 343.)
 États d’excitation : paralysie générale, excitation maniaque simple ou symptomatique, manie aiguë et chronique, démence.

On doit toujours s’en méfier chez les enfants nerveux qui changent de caractère, deviennent paresseux, maussades, hébétés, ont de la difficulté à apprendre. Chez de jeunes sujets il donne souvent la clef de bien des symptômes anormaux et qu’on ne sait à quoi rattacher. Dans tous les cas on doit prendre des mesures mettant le malade ou l’enfant dans l’impossibilité de s’y livrer, car l’onanisme peut amener chez de jeunes enfants un état de folie morale complète. Leur intelligence, au moment où elle devrait se développer, s’affaiblit au contraire. Cela peut enfin mener à une démence précoce incurable.

Chez les malades qui se livrent à l’onanisme dans le cours de vésanies, cette habitude détermine une tendance à la chronicité, et transforme ainsi une maladie curable en maladie, incurable.

Dans les cas chroniques il précipite la déchéance physique.

À tous égards l’onanisme est donc extrêmement préjudiciable à tous les sujets qui s’y livrent et l’on ne saurait trop le combattre.

P.-S.

Texte établi par PSYCHANALYSE-PARIS.COM d’après l’article de P. Sollier, « Idées érotiques », Guide pratique des maladies mentales, Éd. G. Masson, Paris, 1893, pp. 341-349.

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