Dans un article de Journal (Quotidien de Berlin [1] du 25 mars 1922), l’acteur Ludwig Barnay, qui célébrait récemment son quatre-vingtième anniversaire, emploie des considérations spirituelles sur les honneurs qui lui ont été adressés par le passé et encore tout récemment. Il mentionne en plaisantant, qu’il a déjà reçu au cours de sa vie toutes les distinctions dont on ne fait habituellement preuve qu’aux défunts. Dans une ville, on lui a établi un monument, dans une autre une plaque de commémoration sur son logement, dans une troisième enfin, une route porte son nom. Il soulève alors la question de ce qui lui reste encore comme honneurs à recevoir après son décès et, sur cela, il donne la réponse suivante :
« Au besoin, les funérailles, les célébrations de deuil habituelles et un article nécrologique dans les feuilles publiques. Toutefois on devra renoncer à atteler cette triple plaque commémorative sur mon cercueil, puisque j’ai stipulé dans mon testament que mon décès ne pourra avoir lieu qu’après que la combustion de mon cadavre ait été effectuée. »
L’erreur de l’expression contenue dans cette phrase, montre avec une grande évidence le désir de l’auteur de n’absolument pas mourir, et permet de nous faire une bonne vue de la conviction inconsciente qu’a chaque homme de sa propre immortalité.
Il est remarquable que l’expression « avoir lieu » [2] est tout à fait différente, du strict point de vue de la sonorité, de celle qu’elle remplace. Correcte était : « être annoncé » [3]. Cet acte manqué [4] a toutefois été favorisé par la tournure « ait été effectuée » [5] qui est contenue dans la même ligne.
Il n’est pas d’un moindre intérêt psychanalytique de constater que ni le rédacteur ni les correcteurs du journal n’ont remarqué l’erreur de l’auteur. Je peux ajouter également que les lecteurs ont parcouru le passage sans broncher. Un signe de ce qu’ils sympathisent inconsciemment avec le point de vue de l’auteur.