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Richard von Krafft-Ebing

Mélancolie, hystérie et paranoia

Psychopathia Sexualis : IV. — Pathologie spéciale

Date de mise en ligne : jeudi 11 juin 2009

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Richard von Krafft-Ebing, Études médico-légales : Psychopathia Sexualis. Avec recherche spéciales sur l’inversion sexuelle, Traduit sur la 8e édition allemande par Émile Laurent et Sigismond Csapo, Éd. Georges Carré, Paris, 1895.

Les phénomènes de la vie sexuelle morbide dans les diverses formes et états de l’aliénation mentale. — Entraves psychiques. — Affaiblissement mental aigu. — Faiblesse mentale consécutive à des psychoses, à des attaques d’apoplexie, à une lésion de la tête ou à un lues cerebralis. — Démence paralytique. — Épilepsie. — Folie périodique. — Psychopathie sexuelle périodique. — Manie. — Symptômes d’excitation sexuelle chez les maniaques. — Satyriasis. — Nymphomanie. — Satyriasis et nymphomanie chroniques. — Mélancolie. — Hystérie. — Paranoia.

MÉLANCOLIE

La conscience et l’humeur du mélancolique ne sont pas favorables à l’éveil des instincts sexuels. Cependant il arrive parfois que ces malades se masturbent.

Dans les cas que j’ai observés personnellement, il s’agit toujours de malades tarés et qui, avant leur maladie déjà, s’étaient adonnés à la masturbation. L’acte ne paraissait pas être motivé par la satisfaction d’une excitation voluptueuse ; c’était plutôt par habitude, par ennui, par peur, pour amener un changement temporaire dans leur situation psychique très pénible.

HYSTÉRIE

Dans cette névrose, la vie sexuelle aussi est très souvent anormale ; il s’agit presque toujours d’individus tarés. Toutes les anomalies possibles de la fonction sexuelle se rencontrent ici, avec des aspects variés et des complications étranges ; quand il y a une base dégénérative héréditaire, de l’imbécillité morale, on peut constater les formes les plus perverses.

Le changement et l’aberration morbides du sentiment sexuel ne restent jamais sans conséquences pour la vie psychique de ces malades.

Un cas bien remarquable à ce sujet est rapporté par Giraud.

Observation 162. — Marianne L., de Bordeaux, a la nuit, pendant que ses maîtres dormaient sous l’influence du narcotique qu’elle leur avait donné, pris les enfants de ses maîtres, les a livrés à son amant pour ses jouissances sexuelles et les a fait assister aux scènes les plus outrageantes pour la moralité. On a constaté que L... était hystérique (hémianesthésie et accès convulsifs) et que, avant sa maladie, c’était une personne très convenable et très digne de confiance. Depuis sa maladie, elle s’est prostituée d’une façon éhontée, et elle a perdu tout sens moral.

Chez les hystériques la vie sexuelle est souvent excitée morbidement. Cette excitation peut se manifester d’une manière intermittente (menstruelle). Elle peut avoir pour effet une prostitution éhontée même chez des femmes mariées. Quand l’impulsion sexuelle se manifeste sous une forme atténuée, il y alors onanisme, promenades en état de nudité dans la chambre, manie de s’oindre d’urine ou d’autres matières malpropres, de se parer de vêtements d’hommes, etc.

Schule (Klin. Psychiatrie, 1886, p. 237) note surtout très fréquemment un instinct génital morbidement accentué, « qui transforme en Messalines des filles prédisposées et même des épouses qui vivaient heureuses en ménage. » Cet auteur cite des cas où, pendant le voyage de noces, des femmes ont essayé de s’enfuir avec des hommes de rencontre, des cas de femmes très respectées qui ont noué des liaisons sans choix et ont sacrifié toute dignité à leur insatiable avidité sexuelle.

Dans les délires hystériques, la vie sexuelle accentuée d’une manière morbide peut se manifester par la monomanie de la jalousie, par de fausses accusations contre des hommes pour de prétendus actes d’impudicité [1], par des hallucinations du coït [2], etc.

Par moments il peut aussi se produire de la frigidité avec manque de sensation voluptueuse qui survient dans la plupart des cas par suite de l’anesthésie génitale.

PARANOIA

Dans les diverses formes de la folie primaire, les phénomènes anormaux de la vie sexuelle ne constituent pas un fait rare. Car plusieurs formes de l’aliénation mentale provoquent le développement des abus sexuels (paranoia masturbatoire) ou des processus d’excitation sexuelle ; souvent il s’agit d’individus psychiquement dégénérés chez lesquels, en dehors d’autres stigmates de dégénérescence fonctionnelle, la vie sexuelle se trouve aussi souvent chargée de lourdes tares.

C’est surtout dans la paranoia erotica et religiosa que la vie sexuelle est amenée à un degré morbide, que même elle devient perverse dans certaines circonstances et se manifeste assez distinctement. Mais, dans la folie érotique, l’état de surexcitation sexuelle ne se manifeste pas tant par des procédés et des actes qui visent directement la satisfaction sexuelle, que — il y a des exceptions — par un amour platonique, un enthousiasme romanesque pour une personne de l’autre sexe pour la satisfaction esthétique qu’elle procure ; dans certaines circonstances cet enthousiasme peut se reporter sur un produit de l’imagination, un tableau ou une statue.

L’amour sans vigueur ou qui ne se manifeste que spirituellement pour l’autre sexe, n’a d’ailleurs souvent sa cause que dans l’affaiblissement des organes génitaux, résultat de la masturbation pratiquée trop longtemps ; souvent sous l’enthousiasme chaste pour un être aimé, se cachent une grande lubricité et des abus sexuels. Chez les femmes notamment, une excitation sexuelle violente dans le sens de la nymphomanie peut se déclarer épisodiquement.

Le paranoia religiosa aussi porte, dans la plupart des cas, sur la sphère sexuelle qui se manifeste par un instinct sexuel d’une violence morbide et d’une précocité anormale.

Le libido trouve sa satisfaction dans la masturbation ou dans l’extase religieuse dont l’objet peut être la personne d’un prêtre ou de certains saints, etc.

Nous avons parlé assez longuement de ces rapports psycho-pathologiques sur le terrain sexuel et le terrain religieux.

À part la masturbation, les délits sexuels sont relativement assez fréquents dans la paranoia religieuse.

L’ouvrage de Marc contient un cas bien remarquable de folie religieuse qui a conduit à l’adultère. Giraud. (Annal. méd.-psychol.) a rapporté un cas d’impudicité commis sur des petites filles par un homme de quarante-trois ans, atteint de paranoia religiosa et qui était temporairement en excitation érotique. Il faut compter dans cette catégorie un cas d’inceste. (Liman, Vierteljahrssch. f. ger. Med.)

Observation 163. — M..., a mis sa fille en état de grossesse. La femme, mère de 18 enfants et qui est elle-même enceinte de son mari, l’a dénoncé au parquet. M... souffrait depuis deux ans de paranoia religieuse. « Il m’a été annoncé par le ciel que je devais coucher avec ma fille, l’éternel soleil. Alors il en naîtra un homme de chair et d’os par ma croyance qui date de dix-huit siècles. Cet homme sera un pont pour la vie éternelle entre l’ancien et le nouveau Testament. » Le fou avait obéi à cette impulsion qui selon lui était un ordre venu du ciel.

Dans la paranoia persecutoria il se produit aussi parfois des actes sexuels dus à une cause pathologique.

Observation 164. — Une femme âgée de trente ans avait attiré un garçon de cinq ans qui jouait près d’elle, en lui promettant de l’argent et un morceau de rôti ; pene lusit supra puerum flexa coitum conavit. Cette femme était une institutrice, qui, séduite et ensuite délaissée par un homme, s’était jetée pendant quelque temps dans la prostitution, bien qu’auparavant sa conduite fût d’une moralité rigoureuse. L’explication de sa légèreté de mœurs se trouvait dans le fait qu’elle avait une monomanie de la persécution très étendue et qu’elle croyait se trouver sous l’influence mystérieuse de son séducteur qui la forçait à des actes sexuels. Ainsi elle croyait que c’était son séducteur qui avait mis le petit garçon en travers de son chemin. On ne pouvait pas supposer que le mobile de son crime ait été une sensualité brutale, car il lui aurait été très facile de satisfaire son instinct sexuel d’une façon naturelle. (Kuessner, Berl. klin. Wochenschrift.)

Cullere (Perversions sexuelles chez les persécutés dans les Annales médico-psychol., mars 1886) a rapporté des cas analogues, par exemple l’observation d’un malade atteint de paranoia sexualis persecutoria qui a essayé de violer sa sœur, cédant à la prétendue pression qu’exerçaient sur lui les bonapartistes.

Dans un autre cas un capitaine, atteint de la monomanie de la persécution électro-magnétique, est poussé par ses persécuteurs à la pédérastie qu’il abhorre au fond. Dans un cas analogue le persécuteur excite à l’onanisme et à la pédérastie.

P.-S.

Texte établi par PSYCHANALYSE-PARIS.COM d’après l’ouvrage de Richard von Krafft-Ebing, Études médico-légales : Psychopathia Sexualis. Avec recherche spéciales sur l’inversion sexuelle, Traduit sur la 8e édition allemande par Émile Laurent et Sigismond Csapo, Éd. Georges Carré, Paris, 1895.

Notes

[1Voir plus loin, le cas Merlac dans le Lehrb. d. ger. Psychopathol., de l’auteur, 2e édit., p 322. — Morel, Traité des maladies mentales, p. 687. — Legrand, La Folie, p. 237. — Procès La Roncière dans les Annales d’hyg., 1re série, IV, 3e série, XXII.

[2C’est là-dessus que se basent les incubes dans les procès des sorcières au moyen âge.

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